Le 10 juillet 1970 apparaît le terme punk.
Né sur les cendres de mai 68 et du mouvement hippie, l’exposition Europunk qui se déroule actuellement à la Cité de la Musique jusqu’au 19 janvier retrace ce mouvement à travers
son style : musical, vestimentaire et graphique.
Au rez-de-chaussée, l’exposition s’actionne autour de différents thèmes : Sex Pistols, Bazooka, DIY, WTF, Anarchy, New wave, accompagnés de vieux téléviseurs diffusant des concerts, interviews et documentaires d’époques. Comme fil rouge, des panneaux alignés jusqu’au fond de la pièce, constituant des repères historiques de 1970 jusqu’aux années 80. Une période aux nombreux événements marquants, qui déclenchent et révèlent
le mouvement punk. Engendré par une période de crise économique et de fin des idéologies,
le mouvement punk est décrit comme
un enfant illégitime des mouvements DADA, Fluxus et du Situationnisme.
Le mouvement punk est apparu en 1970
en Grande Bretagne et France, et se définit par une énergie inédite, chaotique et radicale, créateur d’une révolution sans cause. Les punks rejettent l’art mais utilise des images pour revendiquer leurs envies, ils prônent un mode de création alternatif et témoignent d’un profond désir de faire table rase du passé et d’un renouveau culturel.
Des événements marquants
1970-74 : Décès Jimmy Hendrix, Janis Joplin blacks panters, pologne communisme, bloody Sunday, cassette vierge dolby et chrome, charles manson, ville libre de christiana, guerre du vietnam, début libération
1975 : Margaret Tatcher, législation de l’avortement, mort de Franco, bilan de la guerre du Vietnam (dette économique, perte humaine) En fond musical, Jet boy de The New-York Dolls tourne en boucle, tandis que nous découvrons la première partie de l’exposition sur les Sex Pistols. Les murs sont recouverts d’immenses affiches sérigraphiées aux couleurs fluorescentes. Derrière les vitrines, on découvre les originaux des pochettes de disques Anarchy in the UK ou encore God Save the Queen, à l’iconographie royale encore très célèbre. À l’origine des Sex Pistols, McLaren recrute John Lydon pour devenir chanteur
d’un groupe appelé The Strand. Très vite, ceux ci prennent conscience de leur impact musical mais surtout visuel. Ils imaginent des images avec Vivienne Westwood et Jamie Reid comme graphiste. La télévision diffuse alors la violence de leurs codes esthétiques et de leur iconographie provocatrice et inventive, qui frappent au delà de la musique et marquent les esprits. Le style musical laisse place au mouvement à part entière. Un style vestimentaire s’en suit.
Des impressions sur des vêtements déchirés, crées par Malcolm Mclaren et Vivienne Westwood dont les inscriptions sont révélatrices du mouvement. Ainsi, « Vive le rock », « Give me danger », « Only anarchists are pretty » ou encore le célèbre « no future » ornent les tissus. Des pièces issues du fond d’archives de John Mcready sur l’Internationale Situationniste.
Le graphisme est utilisé pour détourner, tourner en dérision, et surtout « lutter contre l’aliénation du capitalisme ». Les pochettes CD s’agrémentent de figures politiques malmenées, et d’inscriptions manuscrites raturées. Équivalent visuel des Sex Pistols, la seconde partie reprend les travaux du collectif Bazooka. Des peintures acrylique, des collages, des transparents coloriés, des lettres découpées composent entre autres le style graphique de Bazooka, avec des artistes tels que Lulu Larsen, Loulou et Kiki Picasso, Bernard Vidal, Olivia Clavel, ou encore Jean Rouzeaud. Bazooka utilise les arts visuels, et casse les codes de la bande dessinée. Le collectif joue sur une confusion politique, une provocation permanente et s’empare des médias tel que le journal Libération, et produit ses propres éditions. Des productions qui annoncent le thème à suivre : le DIY (do it yourself).
Force artistique radicale, le mouvement punk propose une approche révolutionnaire du design, avec l’urgence comme injonction libératrice et le do it yourself comme outil.
Les images produites sont diffusées le plus largement possible, il n’existe plus de canons esthétiques ni de savoir-faire techniques académiques. On utilise les photocopies, polycopiés, pochoirs pour créer, sans souci de convention, malgré les censures des lignes éditoriales.
Leur modèle : SNIFFIN’GLUE de Mark Perry, un fanzine anglais crée en 1976 et dédié à la musique punk, qui invite à produire ses éditions soi-même. Des fanzines en tout genre prennent naissance, comme Musique Mécanique de Willy Gibson, couvert de traces de peinture et même accompagnés de sachets plastiques offrant des objets incongrus (copeaux de fer, rose en plastique, boulons, 10 000 lires). Le mouvement punk constitue alors une régression car il s’appuie sur la provocation, la libération
des mœurs et la liberté totale d’expression.La surenchère est omniprésente, à travers
une violence visuelle et verbale gratuite, souvent censurée. L’esthétique négative des punks est alors qualifiée de chaos des formes, et n’hésite pas à reprendre des codes du nazisme, de la pornographie, ou même de la scatologie. Tout ce qui est provocant constitue une arme contre l’ordre établi. Les références bestiaires répugnantes et hostiles sont aussi présentes : rats, cafards, punaises.
Graphiquement, les punks utilisent un expressionisme infantilisant, et considèrent les corps et les visages comme objets d’attaques, de dérision et de travestissement. Comme ultime mot d’ordre, le A de Anarchie. Le mouvement punk répond à une désillusion
des prétentions révolutionnaires, et préfère donc faire l’apologie de la violence et trouve une fascination pour le terrorisme. On retrouve donc une radicalisation du mouvement mais surtout au départ des postures politiques contradictoires. Les punks arborent des signes de différentes provenances et mélangent les codes.C’est seulement vers 1977-78 que leur engagement se tournent vers l’extrême gauche. À cette époque, le mouvement s’inspire de collectif tel que Raket, qui utilise textes et images comme propagande afin de changer la société et non plus dans une optique de « no future ». Au sous-sol, une exposition photographique de BJEP (Belle journée en perspective), propose une approche différente du mouvement, perçu de l’extérieur. Le collectif de photographes, entre 1974 et 82, s’inspire des mouvements socio-culturels de l’époque et de l’émergence punk dans sa collection I’m a cliché.
L’exposition se veut très complète, organisée, et propose une approche du mouvement punk recentrée sur l’iconographie et la communication graphique plus que sur la style musical. Néanmoins, l’exposition se termine sur des animations très bon enfant et un peu décevantes, proposant de réaliser un badge punk et de signer le livre d’or avec des bombes de peintures numériques. Un studio « Play it » est cependant ouvert aux adultes et adolescents et permet d’expérimenter des instruments de musique sur des morceaux punks. EXPOSITION EUROPUNK (du 15 octobre 2013 au 19 janvier 2014) Emmy Marchesse / DSAA1 Design graphique / avril 2014.